Oppenheimer, de Christopher Nolan

 

Oppenheimer

Christopher Nolan est un cinéaste qui, comme Spielberg, a la capacité de réaliser ce qu’on pourrait appeler des « blockbusters d’auteur », c’est à dire des films à très gros budget, dont les ambitions commerciales sont claires, mais dans lesquels il parvient à affirmer sa singularité, son univers. Il est donc capable aussi bien de rentrer dans le moule des films franchisés (il a réalisé 3 opus de la saga Batman) que de proposer des films plus personnels comme Memento, Insomnia, Inception, Interstellar… Le dernier en date était Tenet, sorti en 2020, avec Robert Pattinson. Or ce serait lui qui aurait donné à Nolan l’idée d’un film sur Oppenheimer, le père de la bombe atomique.

C’est la 1ère fois que Nolan s’attaque au genre du biopic (film qui parle d’une personne célèbre ayant réellement existé), et pour ce faire il s’est appuyé sur une biographie intitulée « Le Prométhée américain, le triomphe et la tragédie d’Oppenheimer », un livre qui a obtenu le prix Pullitzer. Le film se distingue donc radicalement des projets précédents, plutôt centrés sur l’action, pour mettre l’accent sur les visages des personnages afin de se rapprocher du thriller psychologique. Néanmoins, le film ne manque pas d’éléments spectaculaires, notamment cette reconstitution de « Trinity », nom de code donné au premier essai d’une arme nucléaire, réalisé le 16 juillet 1945 à Los Alamos, au Nouveau-Mexique. Reconstitution que Nolan a tenu à faire sans effets numériques, uniquement avec des effets spéciaux au moment du tournage (SFX et non VFX), afin de donner davantage une impression de réalité et de menace (la façon dont la scène a été tournée reste d’ailleurs un secret).

On retrouvera dans ce film plusieurs acteurs fétiches de Nolan : Matt Damon, Kennet Branagh, mais surtout Cillian Murphy, qu’il avait dirigé dans la trilogie The dark night, dans Inception et Dunkerque. Très amaigri pour coller à la silhouette d’Oppenheimer, il interprète ici un savant visionnaire et destructeur, à la fois génie du bien et du mal.

Afin de donner un côté assez intemporel au film, le réalisateur a poussé la chef décoratrice vers un certain modernisme plutôt que vers une reconstitution d’époque scrupuleuse. En ce qui concerne les lieux, elle a reconstitué les décors extérieurs de Los Alamos dans un autre endroit du Nouveau Mexique, mais les scènes d’intérieurs ont été tournées sur les lieux même de l’action et en présence de véritables scientifiques qui jouaient les figurants. Un film situé donc dans un univers beaucoup plus réaliste que les précédents films de Nolan, qui met en évidence l’ambiguïté de cette figure de l’histoire américaine et mondiale.

Danièle Mauffrey