Archives mensuelles : décembre 2021

Festival Télérama

ATTENTION ! PAS DE FILM « TOILES EMOI » LES SEMAINES DU 22 ET 29 DECEMBRE 2021Politique de confidentialité

 

  1. Merciiiii. Je viens juste de constater que les messages sont sur le volet de droite sur la page d’accueil!

  2. La liste des musiques du film est disponible sur ce site: https://www.cinezik.org/critiques/affcritique.php?titre=cest-ca-lamour Pour le générique de fin, je pense que…

  3. C’est ça l’amour a été très émouvant. Les trois personnages principaux sont très justes et émouvants. Vraiment une surprise pour…

  4. Belle surprise ce soir avec « c’est ça l’amour ». Vraiment très émue. Un film à revoir , de beaux personnages et…

L’événement, d’Audrey Diwan

 Trois femmes créent l’Evénement:  Annie Ernaux , l’écrivaine, Audrey Diwan la réalisatrice , Anamaria  Vartolomei l’actrice.

Annie Ernaux , 81ans , nous l’avons récemment entendu parler de sa ville : Cergy, dans le documentaire  » J ai aimé vivre là ».

En 2000 elle écrit un roman, récit autobiographique, qu’elle intitule l’Evénement ». Avec son style très abrupt, très cru, très précis , elle met des mots sur son avortement clandestin en 1964.

Audrey Diwan , 41ans , réalisatrice, adapte  ce récit et recrée avec les outils du cinéma, les attitudes , les émotions que l’ écrivaine analyse. C’est son 2ème long métrage après « Mais vous êtes fous  » sorti en  2018 dans lequel elle interroge le tabou de la drogue. Coup de maître , avec l’ Evénement elle remporte le  lion d’or à Venise, c’est le 2ème lion d’or reçu par une réalisatrice française après Agnès Varda pour « Sans toit ni loi ».

Anamaria Vartolomei, jeune actrice de 22ans, incarne Anne, étudiante en lettres dans les années 60.Bouleversante  de vérité, elle a été  inspirée par le style d’Annie Ernaux. Avec un engagement , une rigueur absolus, elle affronte la douloureuse réalité. Sa seule arme : sa détermination 

       Le film , dit la réalisatrice, » est l’ occasion de revenir sur cette période particulière de notre histoire et de la mémoire des femmes  » .Dans les années 60 l’interruption volontaire de grossesse est interdite. Nous sommes 12 ans avant la loi Veil, 4 ans avant la légalisation de la pilule. En avortant  les femmes risquaient la mort ou la prison. Le désir sexuel des femmes est proscrit et honteux.

Audrey Diwan a dû mettre en image l’émotion et le combat d’une  femme  en quête d’émancipation , de liberté, dans un monde régi par des règles  écrasant les femmes . Ce que vit l’héroïne  est une souffrance taboue. Le mot avortement n’est jamais prononcé dans le film. La solitude d’Anne sidère.

 C’est  la raison pour laquelle  le cadre à l’image  a voulu être très resserré sur elle , de façon à transmettre immédiatement aux spectateurs ses mouvements, ses réactions. La caméra à l’épaule s’est  imposée, elle ne lâche jamais Anne pour  mieux scruter son visage, son regard, son souffle: le souffle est un élément  sonore très important. Par le simple traitement de la mise en scène Anne  apparaît comme une petite soeur de Rosetta des frères Dardenne.

La réalisatrice et son chef-opérateur se répétaient  » il s’agit d’ être Anne , non de la regarder, c’est un soldat , on lui donne des coups , elle se relève, elle regarde toujours devant « . Son refus  de capituler , c’est aussi le récit d’une émancipation . Le film parle également de  l’envie de s’élever socialement, de désir intellectuel , de désir physique, en cela il reflète bien une époque .

          On a reproché à Audrey Diwan  certaines  scènes très dérangeantes, elle répond qu’elles font prendre conscience de ce qui a été infligé au corps des femmes. Après la projection Annie Ernaux  a adressé à Audrey Diwan   » vous avez réalisé un film juste  » 

                                              Denise Brunet

La Fracture, de Catherine Corsini

Présentation de la fracture de Catherine Corsini

Ce film est son 11ème long métrage. Sur trente ans de carrière, elle a embrassé plusieurs genres : Poker en 1987 est son premier long métrage. Elle a proposé une comédie acide avec La nouvelle Eve en 1999, un drame fugueur avec Partir en 2009, une chronique féministe d’un amour entre deux femmes qui se passe dans les années 70 : la belle saison en 2015. Un amour impossible en 2018 est une adaptation très réussie du livre de Christine Angot. La réalisatrice a toujours filmé des héroïnes admirables d’insolence et de combativité. Des rôles qui magnifient des actrices comme entre autres : Karine Viard, Emmanuelle Béart, Kristin Scott Thomas et dans la fracture Marina Foïs et Valérie Bruni Tedeschi. C’est peut-être parce que dans sa jeunesse, Catherine Corsini se destinait à jouer avant de comprendre qu’elle préférait faire le récit du monde qui l’entoure, de ses freins de ses injustices et de ses libertés gagnées.

Sur les motivations du film La fracture, Catherine Corsini évoque le fait qu’elle voulait traduire la réalité d’aujourd’hui après deux films d’époque, retranscrire ce monde angoissé, perclus de conflits. Le 1er décembre 2018, Catherine Corsini se retrouve aux urgences de l’hopital Larivoisière alors que Paris était en état de tension avec les manifestations des gilets jaunes, c’est le point de départ de son inspiration.

La fracture ou peut être plutôt les fractures : Le film embrasse toutes les déclinaisons de ce mot :

  • Celle au sein du couple formé par Raf et Julie
  • Celle physique qui frappe Raf et qui la conduit à l’hôpital
  • Celle qui règne au sein de la société française et qui en novembre 2018 vient de donner naissance au mouvement des gilets jaunes
  • Celle qui existe entre le manque de moyen octroyé à l’hôpital public français par les gouvernements successifs et l’extraordinaire dévouement dont font preuve malgré tout, les personnels soignants pour s’occuper des malades.

Le service des Urgences d’un hôpital est le lieu par excellence qui permet de croiser la destinée de gens venant de milieux sociaux très différents. On parle de film choral avec plusieurs intrigues qui s’entremêlent. La cinéaste confronte dans le huis clos d’un hôpital surchargé, un couple petit bourgeois au bord de la rupture à un gilet jaune blessé lors d’une manif.

 Les thèmes abordés : l’état policier, la révolte populaire, la fin du déni de la lutte des classes, la destruction de l’hôpital public, l’ébranlement du patriarcat, la vie, la mort et le désespoir amoureux. C’est dense.

Si le sujet est grave, le film est drôle, embarquant Valérie Bruni Tedeschi, Marina Foïs et Pio Marmai ainsi qu’une actrice non professionnelle qui crève l’écran, en jouant son propre rôle d’aide-soignante : Assiatou Diallo Sagna.

Au niveau du tournage, Catherine Corsini explique qu’elle voulait,avec sa directrice de la photographie, Jeanne Lapoirie, relever un défi physique, être en mouvement constamment. Elle tourne pour la première fois caméra à l’épaule. « Je voulais que la tension vécue à l’hôpital explose à l’écran ». La caméra capte la confusion, le manque et le trop plein.

Le film, et c’est sa cohérence, ressemble aux espaces qu’il décrit : une salle d’attente pleine à craquer qui continue de se remplir et de l’autre côté de la porte, un service saturé qui déborde.

Sylvie PACALET