Archives mensuelles : janvier 2024

Priscilla, de Sofia Coppola, 25 janvier 2024

PRISCILLA

Sofia Coppola est passionnée par la mode, la photographie et la musique depuis toujours. Son parcours artistique est remarquable, au sens où elle peut aussi bien créer une collection d’accessoires Louis Vuitton, que mettre en scène des opéras lyriques ou réaliser une salle d’exposition pour un musée.

Dans le film de ce soir, qui est très différent du film Elvis de Baz Luhrmann sorti en 2022, elle s’inspire du livre autobiographique de Priscilla Beaulieu-Presley Elvis et Moi, écrit en 1985.

Sofia Coppola y dépeint la vie du King à travers les yeux de sa très jeune épouse. Elle aborde la thématique de la quête identitaire de la jeunesse mais aussi celle de l’héroïne-poupée, enserrée dans une prison dorée comme dans son précédent long métrage Virgin Suicides.

Le film reconstitue le décor très glamour de Graceland, à partir de photographies d’époque fournies par Priscilla Presley et de celles réalisées par William Eggleton au moment où la maison du King a ouvert au public en 1982. Il est tourné en studio à Toronto avec un budget plutôt serré, autour de 20 millions de dollars, contre 85 millions de dollars pour le Elvis de Baz Luhrmann.

Dans une approche à l’esthétique impressionniste, la lumière évolue entre teintes marron en contre-jour et couleurs pastel douces et sucrées très lumineuses qui créent l’atmosphère et illustrent les ressentis de l’héroïne.

Vous n’entendrez aucun titre culte du King puisque la société qui gère l’héritage du chanteur a refusé les droits à Sofia Coppola.

Ainsi la Bande Originale mélange des classiques américains et des parties instrumentales composées par les frères Raphaël et interprétées par le groupe d’Indie pop Phoenix auquel appartient Thomas Mars, le mari de Sofia Coppola. C’est une longue collaboration professionnelle qui unit ces deux-là puisqu’ils se sont rencontrés lors de la préparation de la Bande Originale de son premier long métrage Virgin Suicides, en 1999.

Pour incarner les protagonistes à l’écran, la réalisatrice a choisi deux étoiles montantes de la scène hollywoodienne.

Cailee Spaeny, américaine de 25 ans interprète Priscilla. Elle est peu connue du public et a joué dans des thrillers et des séries de science fiction. Elle a reçu le prix d’interprétation féminine à la Mostra de Venise pour son rôle dans Priscilla.

Jacob Elordi, jeune acteur australien charismatique de 26 ans, interprète Elvis. Propulsé du jour au lendemain au rang de célébrité grâce à la comédie romantique The kissing booth, la cabine à baisers et pour son rôle d’antihéros dans la série non moins américaine Euphoria.

Bonne séance à tous !

 

Winter Break, d’Alexander Payne

Winter break, Alexander Payne

Nous vous proposons ce soir de refermer la parenthèse enchantée des fêtes de fin d’année avec ce film d’Alexander Payne, un réalisateur qui a tourné avec les plus grands acteurs américains (Nicholson dans M. Schmidt, Matt Damon miniaturisé dans Downsizing ou encore Georges Clooney dans The descendants). Ce film nous offre une reconstitution d’un hiver des années 70 dans un prestigieux lycée d’enseignement privé pour garçons de la Nouvelle-Angleterre, reconstitution qui rappelle l’âge d’or du cinéma américain. Et pourtant, malgré cet ancrage américain, il s’inspire d’un film français de 1935 : Merlusse, de Marcel Pagnol, qui raconte l’histoire de quelques lycéens laissés-pour-compte à l’internat. Durant les vacances de Noël, ils doivent faire face au plus redoutable des surveillants, Merlusse, au visage balafré. Or au moment où le réalisateur réfléchissait à ce sujet, il a reçu le scénario d’un épisode pilote pour une série située dans un lycée de garçon. Payne a donc proposé au scénariste d’en faire un long métrage.

Le scénario était situé dans les années 80, Payne l’a situé plus tôt car tous ses films subissent l’influence des années 70, époque où, adolescent, il a vu des tas de films du monde entier. Mais c’est aussi pour s’appuyer sur des éléments autobiographiques. En effet, son père était professeur dans un lycée privé où lui-même a été élève, voici le souvenir qu’il en garde : « J’y ai passé six ans et plusieurs des personnages du film sont des composites de gens que j’ai rencontrés là-bas. C’est un univers tellement à part, on y est confronté à beaucoup de richesse et de privilèges, mais aussi à beaucoup de souffrance. L’adolescence est une phase difficile. ».

Payne nous ramène dans les années 70 non seulement par le décor et l’esthétique mais aussi par la forme, la manière de filmer, notamment au moment du générique avec le grésillement de la bande-son, les couleurs désaturées. Le film a été tourné en numérique mais à toutes les caractéristiques d’un film tourné sur pellicule, comme s’il avait réellement été tourné à cette époque.

Pour interpréter son trio de personnages principaux, il a choisi d’abord Paul Giamatti, qui avait déjà tourné dans Sideways il y a 20 ans et qui a tenu à porter un manteau à Brandebourgs comme en portait son père. Pour le jeune homme, il a fait appel à un débutant, Dominic Sessa, actuellement élève de terminale. Quant à la cuisinière, elle est interprétée par Da’vine John Randolph qui vient d’obtenir le Golden Globe de la meilleure actrice dans un 2nd rôle pour sa prestation dans ce film, alors que Giamatti a obtenu celui de meilleur acteur dans une comédie. .

Un mot sur le titre : figurez-vous que « Winter break » est la version française du titre original : « The Holdovers ». « Winter break » met l’accent sur le contexte alors que l’original, que l’on peut traduire par « ceux qui restent », met en lumière les personnages principaux. Parions que vous allez vous attacher à ce trio de mal-aimés et de solitaires, à travers ce film qui commence comme une caricature mais se termine tout en tendresse et en subtilité!