Archives mensuelles : juillet 2022

La nuit du 12, de Dominik Moll

La nuit du 12

 

A l’origine de ce film, il y a un livre écrit par une journaliste, Pauline Guéna, qui a suivi en 2015 et 2016 le quotidien des brigades criminelles de la Police judiciaire de Versailles. De cette expérience, elle a tiré le récit intitulé 18.3 – Une année à la PJ. C’est un livre de 500 pages, un grand réservoir d’histoires vraies parmi lesquelles Dominik Moll en a retenu une, celle d’une jeune fille immolée alors qu’elle rentrait chez elle. Ce qui l’a frappé dans cette histoire n’est pas le crime lui-même, mais le rapport qu’un des policiers entretient avec cette affaire, l’obsession et le trouble que peut provoquer chez un enquêteur un crime irrésolu.

En effet, contrairement aux films policiers traditionnels qui commencent par le crime et s’achèvent sur l’identification de l’assassin, Dominik Moll annonce d’emblée au spectateur que ce qui l’intéresse ici, c’est le mystère, qui dévoile beaucoup plus les mécanismes de l’institution et les ressorts humains que sa résolution. Et plus précisément, ce qui est au cœur de film, c’est le rapport entre les hommes et les femmes. Dans le film, les policiers prennent conscience qu’ils ne sont pas seulement des hommes qui traquent des assassins, mais aussi des hommes dans un monde où ce sont les hommes qui tuent les femmes.

Dominik Moll a choisi de délocaliser cette histoire pour la situer dans les Alpes, afin de sentir la présence oppressante et majestueuse des montagnes, et plus précisément à Saint Jean de Maurienne, ville où se mélangent industrialisation et nature, barres d’immeubles et quartiers cossus.

Le scénario a été écrit par Dominik Moll et Gilles Marchand, également réalisateur de la série Grégory pour Netflix, sur une autre affaire non résolue. Les 2 policiers sont interprétés par Bastien Bouillon et Bouli Lanners, ils forment un duo contrasté et attachant, entouré d’une équipe d’enquêteurs très soudée. Mais les personnages féminins sont aussi très importants : notamment celui de Nanie, la meilleure amie de la victime, joué par Pauline Serieys (qui avait obtenu un César pour son rôle dans Une famille à louer) ou encore la juge incarnée par Anouk Griberg .

Pour son réalisme, ce film a été comparé à L 627, de Tavernier, mais on peut y voir aussi un plaidoyer pour la sauvegarde d’un service public menacé.

NITRAM, de Julien Kurzel

NITRAM, de Julien KURZEL – le 21 juillet 2022

Présentation de Marion Magnard

 

Julien KURZEL est né en Australie en 1974 .

En 2011, son premier film, « les crimes de Snowtown » inspiré d’une histoire vraie, est d’emblée présenté au Festival de Cannes dans la Catégorie « La Semaine de la Critique ». Il. reçoit un bon accueil, les critiques parlent d’un premier film « âpre, abouti et parfaitement maîtrisé ».

Son deuxième film, en 2015, adaptation du Macbeth de Shakespeare, avec notre Marion Cotillard dans le rôle de Lady Macbeth, est présenté à Cannes en sélection officielle mais les critiques auront la dent dure et le public sera tout aussi sévère. On reconnait la qualité de la mise en scène mais ironise sur « une tragédie transformée en blockbuster ». En guise de promotion Marion dira seulement : « ce film m’a valu de monter les marches sur le tapis rouge dans une très jolie robe très sexy ».

« Nitram », comme « Les crimes de Snow town », est inspiré d’un drame réél, qui a bouleversé l’Australie en 1996. Il est présenté à Cannes dans la sélection officielle 2021. Caleb Landry Jones que vous avez rencontré notamment dans « les 3 panneaux de la vengeance » et dans « no country for old men », reçoit le prix d’interprétation masculine, amplement mérité. Vous allez sûrement admirer la mise en scène de KURZEL Je me permets d’attirer votre attention sur le cadrage qui a une signification précise chez le réalisateur. Et sans doute aurez vous une pensée pour Michael Moore et son « Bowling for Colombine », ou pour « Elephant » de Gus Van Sant, et aussi« Sweetie » de sa compatriote Jane Campion…

Mais Julien KURZEL nous précise sa position par rapport à ses prédécesseurs: « Je ne recherche pas le pathos, ni la révolte, ni l’empathie, je cherche seulement à comprendre comment on en arrive là. Je voulais que le public, en particulier celui qui est favorable au port d’armes, passe un moment avec un personnage qui ne devait pas, en toute évidence, avoir accès aux armes à feu ».

Le film est sous tension, et les seuls moments de sérénité nous sont apportés par Helen, jouée par Essie Davis, l’épouse du réalisateur, et aussi quand KURZEL filme la somptueuse nature de la Tasmanie, l’ île de l’Australie où a eu lieu le drame de 1996 et où a été tourné le film.

Et c’est en Tasmanie que Julien KURZEL a tenu à aller vivre avec sa femme et ses deux filles jumelles Stella et Ruby.

Marion MAGNARD