Aki Kaurismäki naît en 1957. Fin des années 1970, il étudie le journalisme à l’université de Tampere en Finlande. À cette époque, il est membre du ciné club, participe à l’organisation du festival du film local et écrit des critiques de film pour la revue étudiante. Hésitant entre l’écriture et le 7ème art, il est recalé à l’entrée de l’école de cinéma car jugé trop cynique.
C’est ainsi qu’il rejoint son grand-frère Mika à Munich, où celui-ci poursuit des études de cinéma. Pour gagner sa vie, il exerce différents métiers : facteur, plongeur, ouvrier du bâtiment. En parallèle, il suit les séances de la cinémathèque locale dirigée par Enno Patalas, expert et historien de cinéma et c’est donc comme çà qu’il fait son apprentissage cinématographique en pur autodidacte. Mika lui propose ensuite de faire l’acteur dans son film de fin d’études, la carrière d’Aki Kaurismäki peut alors commencer.
Les deux frères, cinéphiles et amoureux de la Nouvelle Vague vont par la suite monter une société de production qu’ils appelleront Alphaville en hommage au film de Jean-Luc Godard.
Tout au long de sa création artistique, Aki Kaurismäki ne cesse de dénoncer les dérives d’une société capitaliste et bureaucratique qui oublie l’être humain et détruit son environnement. Il aime mettre en lumière la vie des gens ordinaires, leurs joies et leurs peines. Quatre thématiques se dégagent de la filmographie de Kaurismäki : l’adaptation de classiques de la littérature, Crime et châtiment son premier long métrage sorti en 1983, le road-movie musical et déjanté, Leningrad cow-boys sorti en 1989 et enfin les sagas des ouvriers et des exclus.
Certains d’entre vous se souviendront peut-être qu’il y a 6 ans, au moment de la sortie de L’autre côté de l’espoir, une comédie sur les migrants, Aki Kaurismäki avait déclaré à la télévision finlandaise que ce serait son dernier film.
Aujourd’hui il fait son retour et signe avec Les feuilles mortes le quatrième opus de sa tétralogie ouvrière après Ombres au paradis, Ariel et La fille aux allumettes.
Il n’utilise sans doute plus la caméra d’Ingmar Bergman, mais il reste toujours fidèle à l’argentique. Le film de ce soir est tourné en partie en studio et dans le quartier ouvrier de la ville d’Helsinki. Dès les premières images, on reconnaît la signature d’Aki Kaurismäki avec des plans sombres, cadrés comme des décors de théâtre et illuminés de couleurs jaunes, rouges, vertes et bleues comme dans les tableaux d’Edward Hopper.
Le décor est totalement anachronique mêlant des accessoires en formica et bakélite, un cinéma de quartier qui exhibe de vieilles affiches de film et un transistor qui distille des nouvelles de la guerre d’Ukraine.
Jusqu’au dernier plan du film, on retrouve des références cinématographiques tantôt à Bresson, Ozu, Chaplin, ses divinités domestiques tels qu’il aime à les nommer.
Au centre de ce décor évoluent les acteurs qui parlent peu et dont l’expression tient parfois dans un simple échange de regard.
Alma Pöysti dans le rôle d’Ansa et Jussi Vatanen dans le rôle d’Holappa interprètent deux âmes en peine, une caissière de supermarché solitaire et un ouvrier alcoolique. Ils se croisent dans un bar karaoké, véritable institution en Finlande et c’est le coup de foudre.
Je vous laisse découvrir Les feuilles mortes qui a reçu le prix du jury 2023 au festival de Cannes.